Le concept
C'est dans la campagne profonde des Flandres Française que Groumph, Otago et moi-même retrouvons Pierre, accompagné de ses amis, Joël (alias La Fée Sans L'air) et Didier Cresson, ancien bassiste de Deep Forest entre autres.
L'idée de base est tout à fait logique : les enceintes habituelles sont bourrées de mousse afin que seule la membrane du haut parleur résonne : elles sont rendues anechoïde, c'est à dire anti-résonnante. Pourquoi ne pas exploiter leur potentiel en les transformant en caisse de résonance ? Pierre nous explique : « Le principe est le même que celui d'une table d'harmonie de guitare acoustique. Il y a 2 tables d'harmonies dans l'enceinte, qui sont face à face, et l'aimant d'un haut parleur sert d'excitateur sur l'une d'elle, exactement comme le fait le chevalet d'une guitare. C'est cet aimant qui reçoit l'impulsion électrique qui provient de l'ampli. La bobine va bouger et je vais utiliser cette petite vibration.
Les tables d'harmonies sont accordées vis à vis, la première est excitée, et la seconde répond par sympathie : elles vont se renvoyer la balle. Donc pas besoin de saturer le signal pour que ce soit fort.
J'ai tout le spectre, quelle que soit la puissance. On a mesuré, ça peut passer de 18 Hz à 22 kHz. » Nous sommes bien loin des principes de fabrication des enceintes classiques :
« C'est de la lutherie, ce n'est pas du tout la même principe qu'une enceinte normale. Je fabrique un deuxième instrument de musique pour seconder mon premier instrument.
Il existe grosso modo 29 types différents de barrages de base sur une table d'harmonie. Ils sont là pour propager la vibration. Le truc c'est de jouer avec ça.
Les bois utilisés sont du padouk et de l'épicéa, qui transmettent très bien la vibration. Je vais dresser le bois de manière à ce qu'il conduise la vibration là où je veux qu'elle aille. Après on l'accorde. Là c'est un moment où il faut débrancher le téléphone et qu'on me foute la paix ! »
Alors, concept révolutionnaire ?
« Je ne pense pas que ce soit une révolution, c'est juste une autre manière de voir les choses. Ça m'étonne que ça n'ait pas déjà été fait... »
D'ailleurs, Pierre reste assez discret sur les détails de la fabrication. Même si le brevet a été déposé, on ne sait jamais.
Bon, ben on a compris le principe, voyons voir maintenant le plus important.
Le son
Nous avons eu le loisir de tester ces enceintes avec tout un panel de sources : basse 6 cordes, 4 cordes, demi-caisse, acoustique ainsi que guitares électriques. 2 têtes d'ampli à lampes étaient à notre disposition : un petite Vox Night Train et une Bugera 1990.
Alors ? … (suspense...) Et bien ça sonne !
http://www.youtube.com/watch?v=pE_I3swkG-Y
Plus de détails peut-être :
Nous en avons fait une vidéo, mais le son est très loin de la réalité. Nous n'avions pas à notre disposition un matériel d'enregistrement vraiment adéquat. Cependant, elle vous donnera une idée de comment ça sonne.
Voici comment nous avons ressenti les choses :
Tout d'abord, Pierre nous fait une petit comparaison entre son ampli Vox Valvetronic et la tête Night Train branchée sur les enceintes SW. La différence est flagrante : le son est beaucoup plus riche, il se rapproche d'un son acoustique.
Ensuite, à notre tour de jouer : je branche ma Jazz Bass Reggie Hamilton sur la tête Bugera. Cette basse a l'avantage d'être polyvalente : configuration PJ, active et passive, il y a de quoi s'amuser. Cela faisait longtemps que je n'avait pas entendu ma basse sonner comme ça ! Le son est très précis et très réactif. Comme nous le disait Didier, il ne pardonne pas l'erreur : les glissendo s'entendent fort, elles réagissent à la moindre sollicitation. Particulièrement lorsque je met la basse sur son micro Jazz. La réactivité de ces enceintes est un vrai bonheur pour les plans de slap qui donnent l'impression de rebondir. Mais le son n'est pas froid pour autant : sur le micro précision, elle grogne comme il faut et se montre prête pour un bon rock'n'roll.
Groumph l'a ensuite testé avec son Harley Benton demi-caisse, modifiée avec des micros Duesenberg et le chevalet flottant refait en os. Notre amie la peluche étant célèbre pour son jeu au médiator, le test promet d'être intéressant. Encore une fois, le son est très bon. Pendant qu'il jouait, nous avons pu tester certains paramètres. Tout d'abord, nous avons retourné l'enceinte. Le son reste le même ! Nous avons pu constater qu'il sort effectivement à 360°. Bluffant ! Toujours plus fort, quel que soit l'endroit où nous nous trouvons dans la pièce, le son ne varie presque pas : proche ou loin, en face ou planqué dans un des nombreux recoins (visibles dans la vidéo), ça sonne. Pas besoin de pousser fort pour se faire entendre. La réponse reste la même quelle que soit la note jouée : il n'y a pas résonance particulière sur une fréquence donnée, ni de note qui passe à la trappe. Enfin, sa basse est normalement très sujette aux larsens. Il est impossible pour Groumph de l'utiliser en concert, il la garde pour les sessions studio. Branchée sur les SW, il a fallu pousser les watts pour commencer à la faire larsener.
Petit test avec une Bee and Billy acoustique : le son s'est avéré très sec, trop à notre goût. Les glissandi ressortant énormément n’arrangeant pas la situation. Nous avons été déçus sur ce point. Il faudrait voir ce que ça donne avec une tête dédiée aux instruments acoustiques. Mais Groumph ayant la même chez lui, on peut lui faire confiance lorsqu'il nous dit que normalement elle sonne bien amplifiée.
Autour du viking Otago qui sort la grosse artillerie avec sa Yamaha 6 cordes, active. Histoire pousser le test (le vice?) jusqu'au bout, il coupe les aigus, balance les grave à fond et joue avec la corde de Si : ça passe sans aucun problème. Effectivement, elles encaissent bien vers le bas du spectre. Afin de tester le haut du spectre, je termine en branchant ma Gibson Les Paul Recording, accordée en sol pour le slide. Dans ce cas là, tous ces petits frottements qui ressortent et qui peuvent nous poser problème apportent de la richesse et de la richesse au son. Ça sonnait particulièrement bien. J'ai pu voir ce que donnait l'extrême aigu avec le bottleneck : même dans ce cas ça sonne bien. Ils sont riches et pas trop agressifs.
Je termine en mettant la disto de la tête Bugera : ça a été notre deuxième déception. Le son s'est avéré encore une fois trop sec. Ne connaissant pas cette tête avant, j'ai du mal à déterminer si ce défaut vient de l'enceinte ou de la tête.
Pour avoir un idée d'un son d'ensemble, Pierre branche enfin son ampli Hi Fi et nous passe quelques CD. Encore une fois, le son est superbe : riche et précis à la fois.
Pour conclure.
Nous sommes arrivés dans trois états d'esprits différents : Otago était très méfiant, Groumph n'avait pas d’à priori et moi j'arrivais confiant. Nous somme repartis tous les trois conquis par ces enceintes. Cela vous donne une idée de la qualité de leur son.
Quelle que soit la source, les enceintes Singing Woods répondent avec une précision et une efficacité que j'ai rarement entendu, tout en gardant de la chaleur. Autant dire qu'on a trouvé là la quadrature du cercle !
Évidemment, une telle qualité a un prix, il s'agit là d'un travail de luthier. Il faut environ un mois pour la mise au point d'une enceinte. Le prix de vente est en cours d'étude, mais il devrait tourner autour des 2000 euros l'enceinte. Une somme justifiée par la qualité du travail et du son, tout bonnement exceptionnels.
Il subsiste néanmoins quelques points négatifs : l'aspect trop sec que prends le son avec une basse acoustique et en distorsion. Nous n'avons malheureusement pas pu amener une autre tête d'ampli afin de faire une comparaison plus poussée.
Toutefois, il vous est possible de vous faire votre propre idée : en effet, Pierre est prêt à vous accueillir chez lui afin de les tester par vous-même. Il faut tout de même prendre rendez-vous avec lui, via son site Internet. Vous pourrez alors vérifier vous-même la qualité de ces enceintes et surtout de la qualité de l'accueil de Pierre !
www.singingwoods.fr