Mars Volta : En bref
Il y a quelques années de ça (2001) la formation principale (chanteur + guitariste) s’appelait alors “At The Drive In” pour les connaisseurs. Pour ceux qui ne connaissent pas Mars Volta, on pourrait les décrire brièvement avec un gros raccourci comme les Led Zep / Pink Floyd de 2012 (qu’on me jette une pierre dans l’oeil si ma comparaison vous paraît abominable). En gros c’est du rock à tendance psyché expérimental. Les musiciens sont tous des tueurs et adorent expérimenter des nouveaux procédés musicaux. Voici le line-up actuel :
Cedric Bixler-Zavala : chant, paroles
Omar Rodríguez-López : guitare, production
Juan Alderete : basse
Deantoni Parks : batterie
Marcel Rodríguez-López : percussions, claviers
Lars Stalfors – claviers, manipulation de son
Noctourniquet : chronique de l'album
Ecouter ce genre d’album ne peut pas se faire en une fois pour émettre une critique. La musique est bien trop riche pour être saisie en une écoute. J’ai donc fait cette chronique après 5 ou 6 écoutes afin de saisir en partie toutes les subtilités des morceaux et avoir une vue globale sur l'ensemble. Chaque morceau est détaillé :
1 - The Whip hand ouvre la donne avec quelques FX spéciaux en back qui mettent l’ambiance. C’est plutôt "dark". La batterie est destructurée sur bon nombre de patterns (volonter de "casser" le rythme). C’est extrêmement rare d’entendre ce genre de jeu dans le rock mais on en trouve plus couramment dans le free jazz. Le chant est toujours haut-perché, fidèle à Cedric Bixler-Zavala. Les effets spéciaux se marient très bien avec des tremolo guitare commandés, des squares lo-fi, des automations de tempo. Bref c’est bien produit. Le morceau a une sonorité globalement inquiètante et finit sur un pattern de batterie tout aussi étrange. On a ici la thématique sonore de l’album.
2 - Aegis commence comme un morceau de Radiohead avec des arpèges sombres et modulants. La partie de batterie fait mouche une fois de plus avec des ghosts notes bien senties. L’harmonie est toujours flippante. A 1:25 on retrouve du classique Mars Volta : efficace avec une bonne gouache. Puis le morceau repart sur ses arpèges avec des déclinaisons. Au couplet 2 on entend des séquences au synthé qui rappellent bien “On the run” des Pink Floyd.
Après le 2e Refrain arrive un Pont qui est un développement des Couplets/Refrain. Nous sommes sur une structure classique d'un morceau pop rock. On entend d’ailleurs sur ce pont quelques roulements destructurés à la batterie. Un Refrain en guise de final et c’est emballé. Très bon titre.
3 - Dyslexicon commence avec du tremolo haché et l’harmonie spéciale qui semblerait-il va hanter tout l’album. Le batteur est une fois de plus vraiment monstrueux. On retrouve des doublages vocaux très réussis et bien dans l’ambiance. Beaucoup d’effets en background avec des sons de “laser”. La guitare est arrosée de phaser. On retrouve la cadence flippante des accords "La mineur vers Fa mineur" (cadence flippante). Des équivalences rythmiques bien vues entre guitare et batterie pour une excellente outro. L'un des meilleurs morceaux de l'album.
http://www.youtube.com/watch?v=q58XkUplDn0
4 - Empty Vessels Make The Loudest : Le morceau numéro 4 est souvent un morceau de Lover, la ballade, le slow. Mars Volta suit le mouvement et nous propose cette ballade où la batterie subit de grosses automations au delay. La guitare en arpèges est simple et belle. La basse fait du bon boulot et le doux chant est enveloppée d’un léger slap delay. Les synthés viennent sur le Refrain élargir le spectre. A 2min10, le morceau évolue et tente à se rapprocher des 3 précédents avec des mises en places simples et efficaces. On retourne à la ballade avec quelques effets spéciaux qui mettent dans l’ambiance puis retour à la partie plus rythmée. Viens le thème de guitare. On finit sur une longue outro avec un thème à la guitare simple et efficace.
5 - The malkin jewels : On croirait entendre un morceau de Primus mais avec la basse moins devant dans le mix. La guitare est "Primusienne" avec ces riffs cramés et les contretemps marqués en accord. Même la voix aurait pu être faite par Les Claypool si il n’avait pas cet accent texan très marqué. A 2 minutes on rentre dans le monde du 8 bits et c’est rapidement reparti pour ce tour de tourniquet nocturne. Ambiance flippante, clavier mortuaires, batterie qui part en sucette et vocalises vampiresques. Le jeu s’intensifie et ça commence à être de plus en plus le bordel, dans une ambiance cauchemardesque. Un titre très balaise.
6 - Lapochka Batterie retouchée en 8 bits pour cette intro. Puis le charley infernale arrive sur un thème un peu bizarre, et plusieurs synthés aussi bizarres arrivent. Les vocalisent vampiresques reviennent à la donne. La batterie subit un traitement “reverse” assez surprenant. Le post-refrain m’a par contre moins emballé car plutôt bof. A 3min19 les équivalences rythmiques reviennent à la batterie et celle-ci se destructure comme annoncée dans les précédents morceaux.
7 - In Absentia : Gros son de basse en intro avec un effet flanger + square et un riff qui tient la baraque. C’est rapidement le bordel (trop à mon goût) la batterie prend toute la place sonore. Après 4min la partie B du morceau commence et est je trouve nettement plus réussie (peut-être plus conventionnelle). Les effets de delay à la guitare rappellent la harpe, les synthés sont vraiment bien sentis et se marient bien. A 6 minutes une automation un peu too much sur le master. Pas vraiment utile. On finit en Fade Out. Un peu mou et bruyant dans l’ensemble. Pas un morceau phare.
8 - Imago : Une nouvelle ballade avec une guitare remplie de phaser. La batterie est encore retouchée pour un effet electro. On est dans un format très chanson mais avec des sons travaillés qui viennent colorer. Vers 2 min le morceau tente à se lancer. On retrouve la couleur harmonique de l’album. C’est un morceau très ambiant et qui ne décolle pas vraiment. Sans être mauvais il faut que le morceau suivant soit plus dynamique.
9-Molochwalker : Et c’est chose fait on attaque avec un super Riff Bass guitare Batterie bien rythmé et une voix impeccablement placée. Le Refrain est très efficace et décoré aux synthés. L’utilisation des synthés est je trouve très intelligente pour le moment sur tout l’album. Premier et unique solo de guitare de l’album, assez rock n' roll et crado, bien dans l’esprit du morceau en gros. A 2 minutes on est entre Led Zep et Deep Purple avec une mise en place harmonisée le tout basé sur une équivalence rythmique du tempo de départ. Dommage le morceau est un peu trop court on se serait bien reservit un peu de cet excellent riff.
10 -Zed and Two Naughts. L’intro est électro (un côté “soupe qui boue”) et nous ressert des vocalises précédemment entendues dans l’album. Le morceau se lance. les aigus ont été retirés sur la batterie pour les couplets. Le refrain est très cool et enlevé. Ce morceau est très réussi avec un bon final.
11 - Noctourniquet : On attaque avec des arpèges guitare modulants, des sons électros. Le morceau se lance avec une batterie toujours aussi casse gueule (ce qui fait son charme). Le 2ème couplet tourne très bien. La sonorité rappelle certains morceaux de King Crimson (Elephant talk). Le Refrain est plutôt gentil vocalement parlant. Le morceau se déroule logiquement sans surprise mais finit un peu comme un cheveu sur la soupe.
12 -Trinkets Pale of Moon. Encore des arpèges de guitare mais cette fois c’est de la guitare classique. L’harmonie est toujours inquiétante (c’est définitivement la ligne conductrice de cet album). On entend d’autres hommes chanter en background. Le duo Voix Guitare (bon aller et synthé) est impeccable. A 2 minutes, le morceau est recouvert d’une batterie retouchée. C’est un peu décevant voir ennuyeux. L’outro finit en guitare acoustique. Bof.
13 - Vedamalady : On attaque encore avec des arpèges de guitare du chant du synthé. J’avoue que cette fin d’album commence à être pénible. A 40 secondes le morceau se lance mais retombe finalement 30 secondes plus tard dommage. Le morceau reste quand même globalement bon.
Conclusion
Nous avons là de la très bonne musique rock, très fouillée, originale et cohérente. Certains procédés de composition et d’arrangement sont un petit peu trop redondants quand on écoute tous les morceaux d’une traite. L’album commence très bien mais a malheureusement du mal à se terminer. Un ou deux morceaux mous en moins auraient amélioré l’ensemble. Par rapport aux anciens album de Mars Volta, on entend clairement l’évolution et la proposition artistique bien foutue. L’ambiance est beaucoup plus calme que les précédents ce qui peut être un avantage pour certains tout comme un inconvénient pour d’autres. Au niveau des instruments la basse se fait relativement discrète par rapports aux autres musiciens. Sûrement pour soulager l'ensemble qui est déjà très riche. La batterie est un peu trop retouchée tout le temps et toujours devant le mix ce qui m'a parut sur l'ensemble un peu "too much". La production est très bonne et on entend clairement le gros boulot sur le mixage, les FX et les automations. En résumé : un bon album avec une thématique bien suivie et novatrice mais qui comporte quelques faiblesses sur la longueur.
Franck Graziano